Tu pensais être au courant de tout sur la fast fashion ? Anne‑Florence Richaud, qui a travaillé dans le monde de la mode pour le leader du luxe au sein de la direction environnement du groupe, nous a tout dévoilé lors de sa conférence à Antropia (Aime) pendant la journée Fashion Killer. Derrière les petites robes à 5€ et les tendances qui changent tous les cinq jours, se cache un système aussi violent qu’absurde. Allez, on t’embarque dans les dessous moches de l’industrie qui vend du style à crédit écologique et humain.

La mode qui va (beaucoup) trop vite
« Avant, quand j’étais gamine, je me souviens qu’une marque sortait deux collections par an » nous précise-t-elle. Puis, la fast fashion a débarqué avec ses collections toutes les trois semaines. Et maintenant ? L’ultra fast fashion, c’est une collection tous les cinq jours. Shein, par exemple, balance jusqu’à 7 000 nouveaux articles par jour. C’est même plus une marque, c’est une centrale nucléaire de textile. Cette course folle pousse à produire toujours plus, toujours plus vite… au détriment de tout le reste.
Pollution XXL et fringues a usage unique
Derrière chaque vêtement se cache un vrai carnage écologique. Produire un t-shirt ? 2 500 litres d’eau. Un jean ? Jusqu’à 11 000 litres. Et ce n’est pas tout : l’industrie textile, c’est 10 % des émissions mondiales de CO₂, la deuxième source de pollution après l’agriculture intensive, et la première productrice de microplastiques dans les océans. Rien qu’à chaque machine à laver, on relâche une soupe de fibres plastiques dans l’eau. Et ces habits, on ne les garde même pas : 40 % ne sont jamais portés, souvent brûlés ou enterrés directement pour ne pas alimenter les circuits de revente. Le summum de l’absurde.
Derriere les etiquettes : exploitation humaine et toxiques en bonus
Tu penses que ta jupe à 9€ est une bonne affaire ? Demande à la personne qui l’a cousue pour 5 dollars par jour, dans un atelier sans lumière ni sécurité, où 85 % des ouvriers sont des femmes, exploitées sans droits. Une partie du coton mondial est produite par des Ouïghours en Chine, dans un contexte de travail forcé. Et côté produits chimiques, c’est pas plus joli : dans un sac de vêtements pour enfants Shein, des analyses ont révélé des taux de phtalates 210 fois supérieurs à la norme européenne, sans parler du plomb ou du formaldéhyde, cancérigène notoire. Ces substances sont interdites en France, mais quand rien n’est contrôlé, tout passe.
Le piege mental du “toujours plus”
La fast fashion ne te vend pas que des fringues : elle te vend du shoot de dopamine. Notifications, promos, nouvelles collections… chaque clic active le circuit de la récompense. Résultat : tu commandes sans en avoir besoin, tu portes une fois, tu oublies, et tu recommences. Des études commencent à lier cette consommation compulsive à une augmentation de l’anxiété, des troubles de l’image de soi (merci les mannequins retouchés), et même à des addictions comportementales. Bref, c’est un piège aussi bien pour la planète que pour ta santé mentale.
Changer les regles du jeu, une etiquette a la fois
Mais il y a des alternatives. Acheter moins, acheter mieux, c’est loin d’être ringard. La seconde main, les friperies, la réparation, l’upcycling, la location : c’est créatif, économique et bien plus aligné avec les valeurs d’une génération qui en a ras-le-bol du bullshit. Certaines marques comme Kahani Paris ou Kistaku misent sur des matières nobles, des salaires décents et des pièces pensées pour durer. Ou encore 3e Manche, entreprise locale qui fait de l’upcycling de tenues de moniteurs de l’ESF. Et le vent tourne : 63 % des consommateurs seraient prêts à payer plus pour une mode éthique, et le marché du slow fashion pourrait atteindre 15 milliards de dollars d’ici 2030.
Du côté des pouvoirs publics, ça commence aussi à bouger : la loi anti‑fast fashion du 10 juin 2025 interdit désormais aux influenceurs de faire la promo de ces marques toxiques, met en place des éco-scores, taxe les importations et supprime les retours gratuits. Une petite révolution, à condition qu’on continue à mettre la pression.
Tu votes avec ton dressing
Même si je savais déjà tout ça, entendre Anne‑Florence le dire haut et fort, chiffres et faits à l’appui, donne envie d’aller encore plus loin. Lire les étiquettes pour choisir des matières plus nobles et moins polluantes, consommer éthique avec des marques de slow fashion, préférer une belle pièce que tu porteras 100 fois plutôt que 10 trucs qui dureront deux lavages. On n’a pas besoin d’être parfait.e, mais on peux être lucide. Et actif.ve.
Parce qu’au fond, chaque achat est un vote. Et si on était nombreux à voter pour un autre système, les géants de la fast fashion ne tiendraient pas longtemps.
Tous les chiffres et les informations de cet article ont été tirés de la conférence « Fashion Killer » d’Anne-Florence qui nous a gentiment partagé ces données.



